Habilitation «secret-défense» : les étrangers ne sont pas un danger
Les candidats doivent être « impérativement français et de préférence de parents français nés en France », tel est le critère énoncé dans l’annonce de recrutement parue sur le réseau intranet de Cegetel devenue SFR pour un poste qui nécessitait l’habilitation « secret-défense ». L’annonce restera seize mois sur le réseau.
C’est une affaire de discrimination sournoise qui est jugée le 16 février 2009 par le Tribunal de grande instance de Nanterre : si les faits qui remontent à septembre 1999 ne furent jugés que dix ans plus tard, c’est à cause des « vicissitudes procédurales », affirme le juge. Classée sans suite en 2004, l’affaire sera relancée en 2008 par le parquet de Nanterre, grâce à la persévérance de Samuel Thomas. Les sociétés Cegetel et SFR ainsi que deux anciens cadres de cette dernière sont cités à comparaître sur requête de l’association SOS Racisme.
Lors de la comparution, sans renier les faits reprochés, les deux ingénieurs chargés du recrutement prétextèrent l’urgence de pourvoir le poste et leur crainte commune de ne pas obtenir l’habilitation si les candidats ne satisfaisaient pas au critère de nationalité. L’avocat de la partie civile, Maître Cessieux prouvera que leur crainte était juridiquement infondée : par une question écrite, feu le sénateur Michel Dreyfus-Schmidt obtint la réaffirmation de l’interdiction légale et formelle de subordonner une embauche à un critère de nationalité. En effet, nul ne peut se voir refuser l’habilitation à cause de sa nationalité ou de ses origines.
Les défendeurs essayèrent de faire valoir que l’annonce clairement discriminante était exempte de toute intention discriminatoire. Ce ne sera pas l’avis du juge, qui condamnera chacun des cadres à trois mille euro et mille euro d’amende. SFR au nom du Groupe Cegetel a quant à elle était condamnée à vingt mille euro d’amende.
La portée juridique de cette affaire est considérable, bien qu’elle fût négligée par les médias. Désormais, des centaines de personnes peuvent se prévaloir de leur droit de servir fièrement la France, sans distinction de leur nationalité ou de leurs origines.
Amal Azem
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