20 ans de politique de la ville
Quelles sont vos fonctions aujourd’hui ?
Abdellah : Après avoir travaillé à Fontenay-sous-Bois, Montreuil et Paris, je dirige, aujourd’hui la Maison de la Solidarité à Créteil. C’est un centre social agréé par la CAF qui fait de la promotion sociale.
Réda : Je suis directeur de la MJC de Créteil. Grâce aux activités socio - culturelles, nous créons les conditions d’un meilleur vivre ensemble en facilitant le développement personnel, l’insertion professionnelle, l’intégration par l’accès à la culture et aux savoirs.
Quel regard portez-vous sur ces vingt dernières années de politique de la ville ?
Réda : A l’époque de la présidence de François Mitterrand et jusqu’en 1995, je pense que les choses ont été faites pour venir en aide aux populations les plus défavorisées. En leur donnant par exemple les moyens d’avoir accès à des activités culturelles et sportives ou tout simplement en allant voir un spectacle. Beaucoup ont fustigé cette politique en parlant d’assistanat. Malheureusement tout système a ses travers mais je reste persuadé que c’était la meilleure façon de faire.
Abdellah : Hier il y avait une véritable politique de la ville avec des lacunes certes, mais qui avançait quand même. Maintenant est-ce qu’on peut parler de politique de la ville, de mon point de vue, non.
Pourtant, suite aux émeutes de 2005, le gouvernement à afficher une volonté politique forte de régler la situation ?
Réda : Dans le cadre du « Plan Espoir Banlieue » chaque ministère doit faire un effort financier pour les banlieues. Comment un ministère peut-il accepter de rétrocéder quelque crédit alors qu’il a du mal à boucler son propre budget ?
Abdellah : C’est juste de l’affichage, il existe un Ministère mais c’est une coquille vide. De toute façon la crise est omniprésente. Les quartiers sont touchés par le chômage, la précarité, la drogue, et tout va de pire en pire. Il faut ré-instituer une vraie politique de la ville avec des axes d’intervention prioritaire et les moyens qui vont avec. Ces mêmes moyens qui n’existaient pas, voilà quelques mois, pour nos banlieues et qui, par miracle, arrivent pour relancer l’économie. L’Etat n’a pas hésité à débloquer des fonds pour les banques et les entreprises, ces mêmes entreprises qui délocalisent les emplois.
Quels sont ces axes prioritaires dont vous parlez ?
Abdellah : L’insertion professionnelle des jeunes, la promotion sociale, l’école sont des axes prioritaires. Désormais des associations, comme les nôtres, ne pourront plus mettre en place des heures d’accompagnement scolaire, alors qu’il s’agit là, de l’une de nos principales missions. Les budgets ont été transférés pour payer les heures supplémentaires des enseignants, pourtant les deux sont complémentaires, d’autant plus que l’école vit une véritable crise – postes d’enseignant supprimés, idem pour les Rased (Réseau d'aides spécialisées aux enfants en difficulté) -.
Alors comment faire si c’est l’impasse ?
Réda : Je crois qu’un mouvement est en pleine agitation. Aujourd’hui on fait vivre aux plus faibles de grandes difficultés. Les gens n’ont plus le moral et sont même capables de se battre à coups de couteaux pour dix euros ! Malgré tout j’ai encore un peu d’espoir : l’enthousiasme et l’énergie des jeunes me sécurisent.
Abdellah : Tout le monde doit s’y mettre. Habitants, travailleurs sociaux,… il faut descendre dans la rue, faire du bruit. Il faut exiger de l’Etat un changement radical de sa politique libérale et anti-sociale.
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