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Une mauvaise image produit de l’exclusion sociale
Je voudrais souligner deux aspects qui me paraissent intéressants dans l’image que les médias donnent des jeunes : premièrement, il me semble qu’il y a un problème de représentation générale de la jeunesse en France et pas seulement de celle des quartiers, il suffit de regarder le journal télévisé ; de France 2 pour s’en rendre compte. La jeunesse est reconnue comme un problème par l’ensemble de la société. Je pense que les difficultés que connaissent les banlieues avec leurs jeunes sont des problèmes majeurs, à la fois sur le plan social et sur le plan politique. La politique, c’est la façon dont la société se représente elle- même. La société française se représente à travers ses médias sans ses banlieues. L’enjeu politique est donc de faire rentrer les banlieues dans un espace politique commun dans lesquels les banlieues pourront se représenter.
Au niveau social, c’est l’image que les banlieues donnent à l’extérieur : cette image est très importante pour les habitants des cités où j’ai travaillé. Les gens des banlieues sont extrêmement sensibles à l’image qu’on donne des banlieues dans les médias. L’image a aussi une capacité relationnelle : négative, elle handicape la capacité relationnelle. Celle-ci engendre un schéma d’exclusion. Si les gens ont peur de vous, cela signifie que vous n’appartenez pas à la communauté et qu’on ne peut pas vous faire confiance. La mauvaise image est donc productrice de chômage et d’exclusion sociale. Elle est aussi destructrice de l’identification personnelle de beaucoup de gens dans les cités, ils finissent par avoir en eux-mêmes cette image négative.
Propos extraits de la table ronde «Médias et Banlieue : Une jeunesse terroriste?» des
Assises de l’Égalité le 12 juillet 2013.
Retranscription par Julien Grégoire
DIDIER LAPEYRONNIE
Didier Lapeyronnie est professeur en sociologie à la Sorbonne Paris IV, et membre du Centre d’Analyses et D’Intervention Sociologiques (CADIS). Il est l’auteur de plusieurs ouvrages traitant de la banlieue et de la jeunesse. Son intégration dans la vie des quartiers lui a permis de faire un travail d’enquête d’envergure, donnant à son analyse une finesse qui fait sa réputation
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