La devise républicaine est défaillante
L’égalité devant la loi est un élément constitutif fondamental du pacte républicain et est une réalité indépassable des régimes démocratiques français. Il apparaît aujourd’hui inconcevable de le remettre en cause d’une quelconque manière. Toutefois, un droit n’a d’existence positive et subjective que s’il peut être défendu par le justiciable, que s’il peut l’opposer. Ainsi, l’égalité devant la loi et l’égalité des droits a pour corollaire l’universalité de l’accès au droit et à la justice. Pour chaque citoyen, pour chaque justiciable qui n’est pas en mesure de défendre ses droits, l’égalité des droits, et donc la devise républicaine, est défaillante.
La loi de 1991, qui met en place l’aide juridictionnelle, demeure une grande conquête sociale de la gauche. Elle aura ouvert la porte des tribunaux à un très grand nombre de ménages qui n’y avaient pas accès. Au même titre que la CMU a généralisé l’accès aux soins, la loi de 1991 a généralisé l’accès au droit.
Mais en 20 ans, la situation a changé et le système d’AJ n’a pas évolué. N’étant pas indexé sur l’inflation, son plafond est aujourd’hui bien plus bas qu’il ne l’était. Il en est de même pour la rémunération des avocats, qui ne permet plus un traitement optimal des dossiers. L’AJ bénéficie à trop peu de ménages et assure une mauvaise défense.
Urgence sociale
En outre, les réformes engagées depuis 2007 n’ont fait qu’éloigner les Français de leur justice. D’abord, la nouvelle carte judiciaire, inspirée par l’unique volonté de faire des économies, a élargi les déserts judiciaires dans certaines régions, occasionnant une augmentation des coûts, en raison des déplacements. Ensuite, des pans entiers de la procédure ont été privatisés et confiés aux diverses professions réglementées : des prestations jadis gratuites des greffes sont désormais facturées, et ce légitimement, par ces professions. Enfin, l’absence d’effort budgétaire et la stagnation du budget de la justice ralentissent les procédures, obligent les différents services à hiérarchiser les dossiers. Aujourd’hui, la question est devenue une véritable urgence sociale.
Réformer l’Aide Juridictionnelle
La gauche peut néanmoins envisager un certain nombre de pistes concrètes, immédiatement applicables pour rétablir l’accès au droit et à la justice pour tous.
D’abord, il faut réformer l’aide juridictionnelle. Le plafond de l’AJ totale sera réévalué. La rémunération des avocats serait intégralement remise à plat.
Ensuite, il faut continuer à développer les points d’accès au droit , d’une part pour atténuer les conséquences de la désastreuse réforme de la carte judiciaire, d’autre part pour assurer une présence des professions du droit dans les déserts juridiques, notamment dans ces quartiers en difficulté, où l’accès au droit semble un luxe difficile à atteindre. Pour cela, il importe d’accroître l’implication de toutes les professions du droit et que l’État y garantisse la présence de personnels de justice, greffiers et juges notamment.
Il faudrait rendre plus efficients les contrats d’assurance de protection juridique qui sont souvent sous utilisés, faute d’information suffisante des consommateurs.
Enfin, l’action de groupe doit être introduite dans notre droit car elle rééquilibre le rapport de force entre consommateur floué et firme fautive et diminue les dépenses de l’Etat en réduisant le nombre de procédures parallèles qui concernent la même affaire.
Georges Pau-Langevin
Députée de Paris, Candidate à la réelection
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