Culture »
Culture et politique : pourquoi tant de désamour ?
Tout commence en 1986, dans le quartier populaire de la Goutte d’Or à Paris, quand Hervé Breuil monte une association, ProcréArt, « pour faire remonter la culture par le bas de manière indépendante contre la volonté politique ». C’est dans un ancien lavoir public qu’il décide de poser ses valises, le lieu-même qui inspira Zola pour son roman L’Assommoir. « Il s’agissait d’une association créée entre les habitants du quartier et les gens impliqués dans la culture. Sous l’ère Lang, on croyait à la démocratie culturelle remontée de la base qui permettait de s’exprimer, qui ouvrait des lieux d’expression afin de faire nos propres expériences et diffuser le fruit de notre travail. » Rénové, le Lavoir Moderne Parisien offre une vraie programmation artistique avec la volonté de travailler dans la légalité : un bail pour occuper les lieux et un équilibre budgétaire rigoureux qui lui a permis de fonctionner pendant quinze ans sans subventions. Tout marche si bien qu’en 2000, ProcréArt crée l’Olympic Café, ouvert sur la rue, qui fait aussi office de salle de concert et de lieu d’accueil pour les artistes ainsi que Le Comptoir Africain, une librairie qui surfe sur la richesse culturelle du quartier. Le tout avec des subventions à hauteur de 30 % du budget pour garder une indépendance économique.
« Ici c'est le PS. »
Mais en 2000, la tendance s’inverse. « La charte des missions du service public de Catherine Trautmann poussait à se professionnaliser. On est vite rentré dans un processus financièrement plus lourd avec notre quinzaine de salariés. Et depuis 2006, je suis en conflit permanent avec le maire du 18ème arrondissement, Daniel Vaillant, qui veut nous virer. On a une parole libre, on est indépendant. Ils veulent tenir ce territoire. Ici c'est le PS. » 2011 est un véritable enchaînement dramatique. Les subventions sont coupées. Hervé Breuil entame une grève de la faim de 26 jours qui aboutira au rétablissement des subventions. Mais s’ensuit une liquidation, la fermeture de l’Olympic Café, un audit de la Mairie et enfin la démission d’Hervé Breuil en tant que directeur de l’association qui fait vivre le Lavoir Moderne Parisien.
« Si j’avais su, je me serais engagé dans la politique plutôt que dans la culture », déclare Hervé Breuil, aujourd’hui porte-parole du Parti Pirate. « Ce n’est que par la politique qu’on peut changer les choses. La mairie nous a signifié qu'on ne correspondait pas à la politique culturelle de la Ville. » Un état de fait qu’Hervé Breuil dénonce en pointant l’échec du 104, rue d’Aubervilliers. Projet mené de bout en bout par les institutionnels qui se sont implantés sans tenir compte de la réalité locale.
Christine Chalier
Publier un nouveau commentaire