Anonymiser pour mieux habiter

L’anonymisation s’impose parce que nous sommes face à des discriminations qui sont parfois directes. Tout doit être fait pour les empêcher, c’est une évidence. Ceux qui les pratiquent de manière indirecte le font parfois avec le sentiment de protéger les personnes elles-mêmes. Sans doute c’est une erreur. Si on clarifie, si on met de la transparence dans les dispositifs d’attribution de logements, on assainit considérablement le processus.
Les attributions se font sur plusieurs contingents, le préfet qui n’a pas une vue très précise se fonde par exemple sur le contingent du 1% des entreprises pour la construction de logements etc... Ce qui explique qu’entre la demande et l’attribution il y a parfois un an, parfois dix ans, et il se passe plein de choses dans la mise en adéquation entre l’offre et la demande donc une clarification est absolument nécessaire Si vous avez réussi à pacifier ce niveau-là ou à l’objectiver ou à le rendre plus sain, parce qu’il s’agit de rendre plus saine notre république à travers ce sujet, cela peut décaler le processus de discriminations en amont.
La question des lieux où on attribue les logements se pose également vis-à-vis de la ségrégation territoriale. Si vous avez anonymisé partout, que vous continuez à attribuer des logements sociaux aux catégories populaires, aux plus fragiles, aux étrangers, aux populations d’origines immigrées et que vous les cantonnez dans un territoire parce que c’est là que se trouve le logement social, on n’a pas gagné la bataille, on a gagné une partie de la bataille. La question de la production d’une offre de logement accessible partout est posée. La loi SRU (Solidarité et Renouvellement Urbains) qui vient d’évoluer à 25%, va dans ce sens mais ça ne suffira pas. Il faut mettre en priorité la diversification des habitats pour que tout le monde puisse habiter la ville partout, mais aussi faire de la promotion sociale des quartiers populaires. Qu’ils puissent être des lieux de promotion sociale, où on vit bien d’une part, et d’où on peut sortir.
Christophe Robert
Christophe Robert
Christophe Robert, est Délégué général adjoint de la Fondation Abbé Pierre au sein de laquelle il a notamment en charge la coordination du rapport annuel sur l’état du mal logement en France. Docteur en sociologie, il a auparavant exercé pendant 10 ans une activité de chercheur dans un bureau d’études à Paris dans les domaines de l’habitat, de la politique de la ville ainsi que sur les thèmes de l'exclusion et du développement culturel.
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