Interview : Gisèle Halimi « La contraception ma liberté, l’avortement mon ultime recours, donner la vie mon choix"

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Lundi, 17 Août, 2009
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Gisèle Halimi est avocate au Barreau de Paris, Fondatrice et Présidente de l’association « Choisir La Cause des femmes ». Elle publie aux éditions Plon « Ne vous résignez JAMAIS », l’occasion pour Pote à Pote de revenir sur l’un de ses combats : le droit à l’avortement.

Fortement engagée depuis longtemps, vous avez mené un combat essentiel, celui de la dépénalisation de l’avortement. Pouvez-vous revenir sur cette bataille historique ?

Tout a commencé en avril 1971, avec la publication, à la une de l’Observateur, du « Manifeste des 343 ». À travers ce manifeste, nous en appelions à l’attention de l’opinion publique sur les conditions abominables dans lesquelles se pratiquait l’avortement clandestin. En effet, un million de femmes étaient devenues stériles, contractaient une maladie ou étaient tuées à la suite d’un avortement. L’une de ces caractéristiques, c’est que des femmes célèbres, comme Simone de Beauvoir- à l’initiative du manifeste -, Marguerite Duras, Catherine Deneuve, Nadine Trintignant, Delphine Seyric, Sonia Rykiel... - que l’on a appelé les « Intouchables » - revendiquaient le fait d’avoir commis un délit. Comme vous pouvez l’imaginer, ça a fait beaucoup de bruit. Lorsque Simone De Beauvoir est venue me parler du manifeste, elle ne voulait pas que je le signe par peur de représailles. Évidemment, je ne me suis pas embarrassée outre mesure et j’ai signé. Finalement, j’ai été sanctionnée par le Conseil de l’Ordre. Mais il y a des moments où il faut savoir prendre des risques. Accepter une sanction n’est rien à côté du progrès que votre transgression impulse à la cause que vous défendez. Le succès était tel, que des anonymes par centaines et ensuite par milliers l’ont signé. Quelques semaines après, je recevais un appel assez sévère de ces femmes dont j’avais recueilli les signatures. Elles étaient poursuivies et convoquées par le commissariat de police.

 

On s’en est donc pris aux anonymes ?

On a commencé d’abord par les traiter d’une manière extrêmement vulgaire et méprisante en les tutoyant, en les menaçant. Très vite une réunion d’urgence a été convoquée chez moi, en présence de Simone De Beauvoir, Christiane Rochefort, Delphine Seyric et Jean Rostand. C’est à ce moment-là que nous avons créé l’association « Choisir la cause des femmes ». Son objectif : la défense de toutes les femmes poursuivies pour avortement ou pour complicité d’avortement, mais également pour une éducation sexuelle et une contraception libre et gratuite. Mais notre grande bataille restera l’abrogation de la loi répressive de 1920 qui condamne l’avortement. C’est ainsi que j’ai défendu Marie-Claire Chevalier, 16 ans, poursuivie pour avortement, lors du procès de Bobigny, en novembre 1972. Procès, à mon sens, politique car il a ouvert la voie à l’adoption de la loi de janvier 1975 qui autorisera, enfin, l’avortement.

 

Votre dernier ouvrage « Ne vous résignez jamais » paru aux éditions Plon , sonne comme une injonction pour cette nouvelle génération de femme. Quel regard portez-vous sur elles ?

Les jeunes femmes n’ont pas conscience qu’elles bénéficient d’une liberté, pas comme les autres, ce n’est pas un droit, c’est la liberté des libertés. Elles considèrent l’avortement comme un acquis qui va de soi. Ce qui m’attriste, c’est que le nombre d’avortement par an n’a pas baissé, pire encore il a augmenté chez les plus jeunes. La vraie bataille, aujourd’hui, c’est l’éducation à la contraception.

 

Que faudrait-il faire ?

L’éducation sexuelle doit être enseignée sans tabou et doit commencer le plus tôt possible. Je pense que le gouvernement serait bien inspiré s’il consacrait des spots publicitaires pour expliquer aux femmes que l’avortement n’est pas un moyen de contraception mais un ultime recours. D’ailleurs le slogan de « Choisir » allait dans ce sens-là : la contraception ma liberté, l’avortement mon ultime recours, donner la vie mon choix.

 

N’êtes-vous pas déçue de voir que les choses n’avancent pas ?

Il y a une certaine déception mais en même temps beaucoup de compréhension. Je le vois à travers ma petite fille. Elle a 16 ans et vient de passer son bac. J’ai compris, qu’avec elle, je ne pourrais pas parler de féminisme car elle ne comprend pas qu’on puisse être assez con - ce sont ses termes - pour penser qu’une femme parce qu’elle est femme est inférieure à un homme. Elle est la première de sa classe, plutôt l’âme d’une chef de bande et n’a aucun problème. Moi j’ai vécu des choses plus douloureuses. Il y a donc une question d’appréhension de la discrimination dont souffrent les femmes. Il faut montrer que cette discrimination perdure parce qu’il y a des impératifs économiques. Elle perdure aussi car il y a un système politique qui vit de cette discrimination. Comment se fait-il que les jeunes n’en n’aient pas conscience ? Car lorsque qu’on n’en a pas conscience, il est évident qu’on ne peut pas continuer la lutte.

 

Pour en revenir à l’actualité, que pensez- vous du débat sur l’interdiction ou non de la Burqa ?

À mes yeux la burqa représente le signe, intolérable, de l’infériorisation de la femme, de la ségrégation des sexes et de la ghettoïsation. Je dirais même que c’est un véritable apartheid sexuel. Il y a un monde pour les hommes, un monde libre et puis il y aurait un monde pour les femmes où elles seraient emmurées, emprisonnées. Et cela n’est pas acceptable, au nom de n’importe quelle religion. Il est clair qu’il faut l’interdire mais comment ? Et là, je dois vous dire, nous séchons. On ne peut pas faire une loi pour interdire la Burqa parce que ça voudrait dire qu’on interdit tout vêtement qui ne serait pas un vêtement occidental. Par exemple, on pourrait prendre des arrêtés municipaux dans chaque commune. Mais vous vous rendez compte du nombre d’arrêtés ! Et il faudrait qu’ils soient rédigés dans les mêmes termes, sans exception, autrement on aurait une disparité sur le sol républicain français qui serait néfaste. En tout cas, je ne crois pas du tout à la voie de la dissuasion car il est clair qu’il s’agit d’une manipulation islamiste et pas de l’Islam, ce qui n’est pas la même chose. Il faut donc leur barrer la route avec force et ne pas avoir d’état d’âme parce qu’il ne s’agit pas d’une prescription religieuse et parce que c’est indigne de nos principes d’égalité entre les hommes et les femmes..

 

Propos recueillis par Loubna Meliane

 

 

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