Jeunes : d'accord, mais pas cons

Mis en place par le gouvernement Jospin de 1997 à 2002, les emplois jeunes avaient pour but de faire embaucher des jeunes de moins de 26 ans (moins de 30 ans quand ils ne touchaient pas le chô- mage) en CDD de un an, renouvelable cinq fois, dans les secteurs non-marchands (associations, fonction publique). Ceux qui étaient dans le dispositif en 1999 étaient 86 % à avoir trouvé un emploi dix-huit mois plus tard, dont plus de 85 % en CDI, rappelle une étude du DARES (Direction de l’Animation de la Recherche, des Etudes et des Statistiques) du Ministère du travail, publiée en 2006.
Ce bilan concluant, Pierre Vila, responsable de Mission Locale en Seine-Saint-Denis (93), l’a tiré lui aussi. « Les conséquences de l’existence du dispositif ont été, pour ceux qui en ont bénéficié, plutôt positives. Les emplois jeunes ont permis à ce public, déjà à l’époque marqué par une très grande précarité, de se retrouver dans des situations de travail plus stables que celles qu’ils sont habitués à avoir à l’ordinaire. » Indéniablement ce qui restera comme l’une des mesures phares du gouvernement Jospin a généré de la formation, de l’expérience et de l’emploi.
En revanche, le dispositif n’a-t-il pas fait lourdement chuter le recrutement des fonctionnaires ? « L’embauche au sein de l’Education nationale a posé des problèmes, reconnaît Pierre Vila, ne serait-ce qu’en terme de statut. Des jeunes ont été recrutés à des postes de pions préexistant au dispositif, mais en sous-statut. » Beaucoup ont été recrutés en tant qu’ADS (Adjoint De Sécurité), ce qui a été prétexte à ne pas augmenter les effectifs de la police. Il est aujourd’hui possible d’affirmer que la fonction publique est montée au premier rang des employeurs de précaires notamment grâce à ce dispositif. « Pour moi, une réponse systémique au chômage et à la précarité des jeunes ne passe pas par ce type de mesure, conclut Pierre Vila. On ne peut privilégier des mesures pour lutter contre la précarité indépendamment d’une politique générale. »
Sur le terrain, les emplois jeunes ont constitué une valeur ajoutée estimable. Recrutés surtout pour des postes dans l’éducation, l’éducation populaire, la solidarité ou la sécurité, ils ont développé un véritable savoir-faire dont la Fédération Nationale des Maisons des Potes déplore la dilapidation au bout de cinq ans.
Avec sa proposition d’instaurer 300 000 emplois d’avenir pour seulement 3 ans, Martine Aubry propose à nouveau de remplacer au bout de 3 ans des jeunes, qui auront acquis une maîtrise du terrain, par d’autres jeunes, à nouveau inexpérimentés, à nouveau précarisés.
Au contraire, la Fédération Nationale des Maisons des Potes propose de titulariser 100 000 de ces animateurs éducateurs dans la fonction publique, dédiées à l’éducation populaire, déclare Samuel Thomas, président de la structure. Nous demandons que l’Etat forme et recrute des personnes à un haut niveau de qualification et mène de vraies actions à long terme pour les quartiers. Une mesure qui serait la marque d’une politique offensive de prévention et d’éducation populaire.
Christine Chalier
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