Culture »
« La question de la stigmatisation est pesante pour eux »
Yasmine Oudjebour : Avant tout, pouvez-vous nous présenter votre collection Au nom de la Mémoire ?
Samia Messaoudi : Comme son nom l’indique « Au nom de la Mémoire » est une collection qui publie essentiellement des ouvrages sur les questions de mémoire : celle de l’immigration, de la colonisation, de mémoire urbaine,… autour de ces identités multiples que l’on retrouve aujourd’hui dans la société française et qui font partie intégrante de notre histoire. D’ailleurs, le premier travail que nous avons effectué, Mehdi Lallaoui et moi, porte sur la mémoire de l’immigration en France, publié sous forme de triptyque. Naturellement, d’autres ont suivi comme « 20 ans d’affiches antiracistes », « Du bidonville au HLM », « Le silence du fleuve. Octobre 1961 », etc…. et le « petit » dernier « Antillais d’ici ».
Et ce projet autour de la communauté antillaise, comment est-il né ?
Même si ce projet est né de notre intérêt à travailler sur les questions de la mémoire de l’immigration, ce dernier a surtout été dynamisé par George-Pau Langevin, première députée originaire des Antilles en métropole. En effet, chaque fois que l’on se rencontrait, elle saisissait l’occasion pour me rappeler que les antillais, avec ces histoires d’immigration, eux aussi, étaient quelque part des français et comme disait Césaire « à part entière ou entièrement à part, plutôt entièrement à part » disait-il et « il avait raison » rappelle George-Pau Langevin.
Cet ouvrage est donc dédié aux antillais vivants en métropole, comment est-il articulé ?
Toute la première partie de l’ouvrage est consacrée à l’histoire des domiens, au pourquoi on est allé les chercher, leur installation en métropole, … vient ensuite la question de l’esclavage, celle de l’identité antillaise, traitée de façon approfondie, et enfin une suite de portraits. Au travers de ces parcours singuliers et attachants, nous avons présenté des portraits d’hommes et de femmes qui témoignent de leur histoire, de leur vie en métropole. Chacun raconte son exil, son appartenance à la créolité, sa recherche identitaire, les discriminations dont ils sont victimes, le retour au « pays »,…
Parmi l’ensemble des témoignages recueillis, avez-vous remarqué un sentiment commun ?
J’ai pu constater, en effet, que pour beaucoup la question de la stigmatisation, dont ils font l’objet, est pesante pour eux. Chaque fois ils insistaient sur le fait qu’être antillais ne se limite pas au punch ou au zouk ! Avec toujours cette volonté de souligner que, eux aussi, possèdent leur propre histoire, leur propre culture, leur propre langue et comptent bien la transmettre à leurs enfants. En fait, ils sont vraiment dans ces rapports à leur identité et leur créolité est extrêmement importante dans leur construction.
Propos recueillis par Yasmine OUDJEBOUR
Antillais d’Ici : textes et photos de Samia Messaoudi et Mehdi Lalaoui- 140 pages- Couleur- 25 €
Une exposition aura lieu du 1er au 29 avril prochain à la Mairie de Paris, un documentaire est en cours de réalisation et sera prochainement diffusé sur France O.
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